Sport à l’école, bon ou mauvais élève ?

Sport et santé

Alors que les ministres des sports et de la santé ont conjointement appelé de leurs voeux à ce que la requête récurrente des enseignants d’une heure de sport hebdomadaire supplémentaire soit entendue, le Grand-Duché est-il à la traîne au niveau européen ?

Au ministère de de l’Éducation nationale, on assure que la promotion du sport fait partie des préoccupations. Ne retrouve-t-on pas dans l’accord de coalition du gouvernement 2023-2028 un projet d’ « analyses ciblées pour évaluer les pratiques dans des domaines de l’activité physique ou l’alimentation saine » ? Au-delà de ces louables intentions, seules quelques lignes marquent la volonté de lutter contre l’inactivité chez les enfants, avec le « renforcement » de projets à l’instar de « Bewegte Schule », et l’ « encouragement » pour les structures de l’éducation non formelles à développer des programmes similaires.

État des lieux

En 2024, malgré la réforme de 2009 qui a su inscrire dans la loi scolaire la Ligue des Associations Sportives de l’Enseignement Fondamental (LASEP), l’éducation physique et sportive reste l’un des parents pauvres de l’éducation. À l’école fondamentale, dès le cycle 1 les apprentissages doivent consacrer une partie du temps scolaire à la psychomotricité, l’expression corporelle, et la santé. Dans les faits, deux heures hebdomadaires sont dédiées à partir du cycle 2 à l’initiation aux sports et l’activité physique. Lors du passage à l’enseignement secondaire, ce sont trois heures par semaine en 7e qui se réduisent à deux en 6e, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une heure unique hebdomadaire en 3e. L’activité physique étant encouragée hors les murs de l’école par des  initiatives telles que le Plan National GIMB (« Gesond iessen, Méi beweegen ») 2018–2025 qui a fédéré les ministères des Sports, de la Santé, de l’Éducation nationale, et de l’Enfance, la Jeunesse, la Famille et l’Intégration depuis 2006, avec en point d’orgue une journée nationale en lieu et place de… celle du sport.

Renforcement d’initiatives, encouragement à s’inscrire dans des innovations volontaires. Autant dire des coups d’épée dans l’eau. Saluons cependant « Bicycool: Sécher a mat Freed Vëlo fueren », porté par le Service de Coordination de la Recherche et de l’Innovation pédagogiques et technologiques (SCRIPT) qui met en place une activité draisienne pour les enfants jusqu’au cycle 1 et un parcours d’adresse mobile en vélo pour les élèves des cycles 2 à 4, et « Clever move », projet pédagogique proposant de multiples activités physiques d’une durée de 15 à 20 minutes pendant les cours, avec l’intérêt cognitif au-delà de la santé sur la capacité à se concentrer et sur la disposition à apprendre. Mais à titre d’exemple en 2022, seules 20 écoles fondamentales et 4 maisons relais ont participé à « Clever move ».

Mais qu’en est-il chez nos voisins européens ?

En France, ce sont 108 heures annuelles consacrées à l éducation physique et sportive au primaire, soit 3 heures hebdomadaires auxquelles s’ajoute la demi-heure quotidienne voulue par le ministère chargé de l’Éducation nationale dans le cadre des Jeux Olympiques de Paris 2024 et calquée sur ce que la Belgique pratique depuis la rentrée 2022. Un total de 5 heures par semaine qui place nos voisins directs parmi les bons élèves. En théorie tout du moins, car ni du côté de Bruxelles, ni de Paris, les directives ministérielles ne sont suivis des faits : les enseignants sont bien démunis pour les intégrer à des programmes déjà lourds dans des temps scolaires réduits. Et le Grand-Duché est champion en la matière, avec un nombre total d’heures d’enseignement sur les 5 premières années de 5440 heures, soit le double des cours dispensés en Bulgarie (2640) et bien plus qu’en France (4320). 

En Allemagne, les cours qui commencent à 7h30 et s’achèvent à 11h30 en primaire pour laisser l’enfant se consacrer à son rythme aux activités culturelles, artistiques et sportives ne sont plus le modèle répandu autrefois tant vanté. À l’image de “las extraescolares” en Espagne, l’école encadre désormais ces activités dites périscolaires trop souvent vectrices d’inégalités sociales auparavant, et qui comptent autant dans la moyenne de l’élève que les disciplines fondamentales. C’est donc toute une philosophie de la valeur du sport dont il faut s’inspirer. Une approche à la nordique fondée  sur le sport comme moteur de socialisation et enjeu de santé public. Comme en Islande, avec cette heure quotidienne de « défoulement » dans le gymnase, en dehors des récréations, qui prend souvent la forme de parties de foot improvisées et inscrit le mouvement dans le rythme de vie et les habitudes des élèves.

Ni bon ni mauvais élève, nous avons tout intérêt à piocher les bonnes idées, multiplier les expérimentations, faire la promotion des clubs sportifs et activités extra-scolaires. Sans oublier le fondement même de l’éducation : la mimêsis ; c’est en pratiquant nous-mêmes une activité physique au quotidien que nous inciterons le mieux nos enfants à nous imiter.

Sources : 

Ministère de l’Éducation Nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse
« Organisation of School Time in Europe – Primary and general secondary education education, 2011/2012 », Eurydice
« LUXEMBOURG Physical Activity Factsheet 2018 et 2021 », World Health Organization

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