DIFFERDANGE, LA PALMA D’OR DU FUTSAL

Après avoir tout raflé à l’échelle nationale, la section futsal du FC Differdange va se frotter au gratin européen en Ligue des champions fin octobre, à Majorque.

Au lendemain de la Supercoupe de Luxembourg de futsal, le sourire est sur toutes les lèvres au FCD03. Les joueurs de Differdange ont pris une double dose de plaisir : remporter leur troisième titre de la saison et battre leur rival, le Progrès Niederkorn. Le score ? 11-2. Loin de refléter l’écart entre les deux équipes, mais témoin de la force de frappe de la formation emmenée par Bruno Amaral. Ce trophée est le troisième de la saison après la victoire en Coupe face… au Progrès, et celle en championnat. Le titre de champion national est le troisième consécutif. Le cinquième de l’histoire du club. « C’est le fruit d’un travail de six saisons », reconnaît l’entraîneur Bruno Amaral, arrivé au Luxembourg en 2017 après avoir fait carrière dans le futsal au Portugal. « On est très fiers du travail de tous les joueurs. J’ai effectué mon expérience au Portugal et j’ai essayé de reproduire la même chose ici. »

« Le futsal n’est pas aussi connu
qu’au Portugal »

Joueur puis entraîneur, en deuxième division dans son pays natal, Bruno Amaral a découvert au Luxembourg une discipline qui se cherche encore. Au Grand-Duché, le futsal n’est pas aussi répandu qu’au Portugal et tous les clubs de l’élite n’ont pas forcément une section dédiée à cette discipline. « Ici, c’est différent du Portugal, donc c’était plus difficile de mettre en place ce qu’on voulait. On a progressé au fur et à mesure, avec des joueurs qui viennent du Portugal et d’Amérique du Sud. La saison dernière, on a eu trois Argentins et trois Paraguayens. » Le fruit du réseau du club qui, comme pour le foot à 11, a ses entrées en Amérique du Sud. « On a un bon contact sur place », précise Rémy Manso, le directeur sportif du club de foot, qui a d’abord fait ses gammes dans la section futsal. « J’ai commencé pour donner un coup de main. Je voyais qu’il y avait beaucoup de joueurs de futsal, mais ils venaient du foot de rue. La saison dernière, on avait notamment David Chalmandrier, un très bon joueur, qui vient d’arrêter pour faire du padel. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de formation ici, on est trop en retard, on part de rien ou presque. La fédération, déjà, devrait faire quelque chose. On est dans les dix-huit meilleures équipes d’Europe et on n’a même pas de sélection nationale. »

Djo en veut encore !

Grâce à ses légionnaires, le FCD03 a gravi les échelons du futsal luxembourgeois. D’année en année, l’équipe s’est considérablement améliorée. Étape par étape. « Chaque année, on renforce l’effectif avec plusieurs joueurs. D’autres équipes font venir des joueurs du Portugal, mais le secret, c’est l’organisation », selon Bruno Amaral. Robinho Oliveira fait partie des meubles au sein de l’effectif differdangeois. Arrivé en 2017 à l’âge de 19 ans, le Portugais a quitté la deuxième division portugaise pour tenter l’aventure au Luxembourg. Bingo, le milieu offensif a participé à toutes les belles épopées de l’histoire récente du club. « Au départ, on avait plus de joueurs locaux. L’ambiance était différente, on jouait dans une plus grande salle, il y avait davantage de spectateurs avec la famille et les amis de joueurs. C’était magique, le premier titre, c’était formidable, je n’ai pas de mots », se souvient le numéro 10. Au club depuis 2018, « Nunex » Nunes fait lui aussi partie des anciens de l’équipe. Le portier n’a pas hésité à rallier le Luxembourg pour évoluer dans sa carrière de joueur de futsal. « Depuis mon arrivée, l’équipe a énormément évolué. Aujourd’hui, le club est d’un autre niveau, c’est une autre dimension, une autre classe, avec des joueurs d’expérience. » En tête de gondole, Jorge Augusto Fernandes, ou plutôt Djo pour les intimes et les aficionados du futsal. « Tu demandes à n’importe quel fan de futsal dans le monde, il connaît Djo », lance Rémy Manso. « J’ai tout de suite regardé au Portugal et voulu un grand nom. C’est une star, il a joué la Ligue des champions avec le Sporting. Même s’il ne joue plus au plus haut niveau depuis cinq ans, ça reste un excellent joueur. » Djo en a encore sous la semelle et son palmarès parle pour lui : sept championnats, cinq Coupes et une Coupe de la Ligue, dont un triplé en 2017-2018. Un magnifique cadeau d’adieu pour son club formateur avant son départ pour Leões Porto Salvo. Désormais âgé de 37 ans, Djo reste un cadre de l’équipe, emmenée par l’inarrêtable Ruben Reis. Depuis son arrivée en 2019 en provenance du Modicus Futsal, l’ancien de Rio Ave (2015-2018) comptabilise 179 buts en 96 matchs sous les couleurs du FCD03, toutes compétitions confondues. Vertigineux. « On pourrait jouer dans les meilleurs championnats du monde. On manquerait de rythme, c’est la seule grosse différence », reconnaît Rémy Manso. « On donne beaucoup d’importance au groupe, c’est notre force. On se renforce chaque saison par petite touche pour favoriser la cohésion. »

Des tops joueurs… amateurs

Grâce à son réseau, Differdange attire dans ses filets des joueurs très talentueux du monde entier, bien plus forts que les joueurs locaux. Pour autant, ces praticiens confirmés du futsal sont amateurs, ici, au Grand-Duché. « Tous gagnent la même chose. Ils sont payés au point et ont un travail. On les aide aussi, eux et leurs proches, à trouver un travail ou une maison. On arrange les horaires pour qu’ils aillent à l’entraînement, mais malheureusement, si on a vraiment besoin d’eux au boulot, priorité au travail, avec l’accord de l’entraîneur. Ça n’empêche pas que le dimanche, on montre plus d’envie que certaines équipes professionnelles, parce qu’on choisit bien nos joueurs. Il faut avoir la notion de la réalité, les choses ne se passent pas toujours comme tu le voudrais, c’est comme ça. On a eu des gars très forts techniquement, mais qui humainement n’étaient pas top. » 

Le gratin du futsal européen

Grâce à ses résultats à l’échelle nationale, le FC Differdange a le bonheur de pouvoir vivre l’aventure européenne en Ligue des champions. Éliminé en seizièmes de finale en 2020-2021 sous une formule particulière liée au covid, le FCD03 retrouve le tour principal, comme la saison passée. Placée dans la voix B en 2022-2023, celle où le premier de chaque groupe seulement atteint le tour élite, la formation de Bruno Amaral est cette fois dans la voix A, où les trois premiers de chaque groupe (sur quatre) atteignent ce fameux tour élite. « Mon rêve était de nous retrouver ici. J’avais calculé qu’on tomberait dans ce groupe. Personne ne me croyait, mais finalement, c’est arrivé », s’amuse Rémy Manso. Actuellement dix-septième au classement des meilleures équipes d’Europe, Differdange va se frotter au gratin du futsal continental : Mallorca Palma Futsal (4e et champion en titre), Kaïrat Almaty (5e, vainqueur des éditions 2013 et 2015), et Haladás, club hongrois ayant fini dernier de son groupe la saison passée. « On était 53e au classement européen quand je suis arrivé », se souvient Nunex Nunes. « Personne n’aurait imaginé qu’on puisse atteindre cette place au classement. Ça va être différent, y compris au niveau de la préparation. C’est très difficile, mais pas impossible. » Pour Robinho Oliveira aussi, c’est l’occasion d’affronter les cadors de sa discipline. La juste récompense de tous les efforts fournis depuis plusieurs années. « On a toujours rêvé d’atteindre les meilleures compétitions du monde, c’est notre rêve depuis petits. C’est comme si on allait jouer Manchester City ou le Real Madrid », se réjouit le joueur arrivé il y a près de huit ans au Luxembourg. « Je sortais de l’école quand je suis arrivé, je n’avais pas de boulot et j’ai tenté l’expérience. Ça fait presque huit ans et je ne suis jamais reparti. Cette saison, c’était le top. On a fait 3/3, c’est magnifique pour le club et les joueurs. Ça nous donne la motivation pour aller en Ligue des champions avec le plein de confiance. On va jouer les matchs que l’on aime : les matchs chauds, difficiles, qui se décident à la dernière seconde. On a travaillé toute l’année pour en arriver là. On va jouer contre Kaïrat, qui a des joueurs formidables, Palma, les champions en titre, mais on a aussi des joueurs d’expérience qui ont joué en première division portugaise, l’une des meilleures ligues d’Europe. Jusqu’à la dernière seconde, il y aura de l’espoir. Il faut continuer, le boulot, ça va venir. L’équipe derrière nous donne le meilleur pour qu’on se sente bien, eux aussi méritent de profiter. » 

« Il faut se gérer, mais en même temps être au top »

Aux côtés de Rémy Manso, toute une équipe met les joueurs et le staff dans les meilleures conditions possible pour performer. « Avec Umberto, Filipe et Ana, on a la même structure que depuis le premier jour. On peut être fiers. » L’ensemble du groupe peut entièrement se focaliser sur le défi qui l’attend : prendre au moins un point. « Tout le monde y croit, mais le groupe est mal fichu pour nous », lance le directeur sportif du FCD03. « Même un match nul peut nous permettre de passer. On doit se battre pour prendre moins de buts qu’Haladás, mais on joue d’abord les plus forts. Si on donne tout, on risque d’avoir un blessé ou un suspendu, mais on doit être à 100 % pour battre Haladás, qui est aussi beaucoup plus fort que nous. Il faut se gérer, mais en même temps être au top. Dans le même temps, Kaïrat et Palma vont vouloir mettre un maximum de buts contre nous pour se départager. On risque d’en prendre dix, mais je préfère en prendre dix et me qualifier qu’en prendre deux et ne pas passer ce tour », détaille Rémy Manso.

Differdange, la surprise ?

Malgré sa présence dans les meilleures équipes d’Europe, Differdange reste une équipe encore méconnue aux yeux de ses adversaires. « Tout le monde ne nous connaît pas, même si on fait partie des meilleures équipes européennes », atteste Bruno Amaral. « J’ai discuté avec l’entraîneur de Kaïrat, il trouve ça incroyable que l’on se retrouve ici. On va jouer des équipes d’un autre niveau, qui ont des joueurs évoluant dans leurs sélections nationales, des Brésiliens… On va essayer de battre Haladás, le match le plus équilibré des trois. Jouer Palma, le tenant du titre, c’est le défi d’une vie pour certains joueurs. » Avec des joueurs talentueux et un groupe soudé, le FC Differdange a prouvé par le passé – en battant par exemple Anderlecht en amical il y a quelques mois – qu’il était capable de réaliser des prouesses. Les joueurs de Bruno Amaral n’iront pas à Majorque pour profiter du soleil qui leur manque tant, et n’espèrent pas repartir avec la Palme d’or, mais ils donneront le maximum pour assumer leur rôle de dix-septième meilleure équipe d’Europe. Et mettre le nom du Luxembourg sur la carte du futsal européen.

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